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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/117

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AU ROY.


SIRE, pour faire meilleure distinction de chascun Oyseau à part soy en son propre chapitre, commencerons par les oyseaux de rapine : & ayants trouvé que les Vautours sont les plus grands en toute ceste espece, seront descrits les premiers, consequemment les Aigles, puis les oyseaux de fauconnerie, & autres vivants de proye, puis finirons par les oyseaux de nuict. Nous avons expressement laissé à parler des Griffons, comme de chose oyseuse, & fabuleuse. Car s’il en eust esté quelque chose en l’estre de nature, il est tout certain qu’Aristote ne l’eust laissé en arriere : joinct que tous autres anciens autheurs Grecs, & Latins, confessent que ce qui en ha esté racompté, est pure fable. Nostre vulgaire mesme, voyant quelque peinture lourdement esbauchee, l’appelle ouvrage Griffonné. Parquoy nous sommes deportez d’en dire davantage. Lon fait monstre d’un pied d’excessive grandeur en la sainte chapelle de vostre Palais à Paris, qu’on estime de Griffon : toutesfois q’uil semble artificiël, & non naturel. Aussi nous sommes voulu taire des Harpyes, Chimeres, Pegasi, qu’on dit Chevaux aellez, Cocs-atris, Dragons, Sphinges, & tels autres animaux, qu’on feinct estre aellez, d’autant que ne les advouons en l’estre de nature, joinct qu’en avons plus amplement escrit en noz observations des païs estranges. Nous esperons ne faillir en ce que monstrerons des oyseaux de rapine de nostre païs, qui ont obtenu nom Francoys : mais estant toute la difficulté mise à leur rendre leurs noms anciens, userons de noz conjectures, faisants comme les aveugles, qui s’essayent de diviner les nombres & figures à tastons. Et lá ou se trouveront autres qui en puissent mieulx prononcer, que nous, nous submettons à changer d’opinion, lá ou aurons trouvé le contraire : car tout ainsi comme il est à presupposer qu’Aristote ha mieulx cognu les oyseaux de proye des païs de Grece, aussi peut estre que nous en avons en noz contrees, & qu’on nous en apporte des païs estranges, desquels ne les Latins, ne les Grecs n’ont fait aucune mention.