Aller au contenu

Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/134

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

Et entre autres passages, il dit au septiesme chapitre du trentiesme livre Unum est Ossifrago intestinum mirabili natura omnia devorata conficiendi. Aristote parlant de l’Ossifragus, au trente-quatriesme chap. du neufiesme livre De natura animalum, avoit dit tout cela plus au long : Phinis (dit il) est quasi aussi grand comme une Aigle, mais il ne voit gueres bien le jour, ains vole la nuict à la maniëre des Hibous, & Cheveches : & de fait il l’ha descrit avec les oyseaux nocturnes, disant Parum haec oculis valet. Nubecula enim oculos habet laesos. Estant donc cest oyseau Ossifragus du genre des Aigles, il vit de chair, & ha l’ongle crochu : sa couleur tire sur la cendree. Aristote au mesme livre dit qu’il fait son nid, & vit religieusement, & estant de besnigne nature & de provision nourrist les petits de l’Aigle quand elle les ha delaissez, lesquels il garde cherement jusques à tant qu’ils soyent assez grands. Aristote met encor plusieurs choses de sa nature qu’avons laissé à cause de briefveté. Mais lá ou Aristote entend des petits de l’Aigle, Pline ha interpreté des petits de Haliaeetus. Il est maintenant question de sçavoir que c’est Ossifragus. Nous avons des-ja dit que les Françoys nomment Haliaeetus, une Offraye, ou Orfraye & dirons par cy apres que Caprimulgus est nommé une Effraye, qui est aussi oyseau nocturne. Quelque fois avons esté d’opinion que ceste Effraye estoit Ossifragus, mais voyants qu’Arist. l’ha nommee Aegotilax, & l’ha separement escrit de Phinis, avons resolu en faire difference. Nous avons ouï parler quelques gents d’authorité qui dient avoir veu des oyseaux de proye moult grands qui avaloyent, & mangeoyent les os quand on leur en bailloit, & par cela on les souspeçonnoit Ossifragi : mais considerants la corpulence qu’ils dient de tels oyseaux, pouvons asseurer que c’estoyent Vautours. Cognoissant que quand quelcun n’escrit que par authorité, & s’arreste & appuye sur celuy qu’il approuve, laisse quel quesfois son jugement en arriere, & fait le plus souvent nuisance à la chose dont il prend parler, avons determiné escrire d’un oyseau rare & non souvent veu en noz contrees, qu’avons nommé petit Vautour. Non que vueillons nous attribuer ceste authorité de luy composer nom moderne, ne luy en sçachant aucun, ou qu’ayons onc ouï homme qui l’ait ainsi nommé en Françoys : mais c’est que voyants un oyseau de la corpulence, couleur, & contenence d’un Milan hor mis deux taches noires qu’il ha au costé des aelles, portant la teste d’Autour, les jambes & pieds de Vautour, & de couleur jaulne, & estre moult bien garny de duvet dessous les grandes plumes, comme un Vautour, avons prins argument de le penser estre celuy, dont Pline suyvant l’ombre d’Aristote ha parlé, au dixiesme livre de l’histoire naturelle, chap. troisiesme, ou il disoit : Quod ex Haliaeetis natum est in Ossifragis genus habet, è quibus vultures progeneratur minores, etc. Encor dit : Haliaeeti suum genus non habent, sed ex diverso Aquilarum coit unascuntur : & id quidem quod ex iis natum est in Ossifragis genus habet. Mais nous qui avons eslevé les petits de Haliaeetus, ne nous accordons à ce qu’il en dit, comme avons fait voir au chapitre du Haliaeetus. De touts oyseaux de proye, n’avons cognu aucun, qui eust plumes dessoubs les aelles, aux aisselles, & aux jambes que les Vautours, cestuici, & les oyseaux de nuict. Monsiëur d’Aramont l’apporta à son retour de Turquie, & l’ayant monstré à plusieurs fauconniers de la court, ne sçeurent onc quel oyseau c’estoit, attendu q’uil est rarement apporté en noz contrees. Il disoit qu’on le print en Esclavonië sur une Turtrelle : & toutesfois qu’ayant esté leurré, ne s’est trouvé de hardy courage. Ses griffes estoyent moult ouvertes, le bec & doigts jaulnes. Ils