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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/140

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par les campagnes, chasse aussi aux Allouëttes : & s’il en advise aucune, est coustumier de se jecter dessus : mais elles ont recours à se garentir en l’aer, & gaigner le dessus. Mais si le Hobreau s’y trouve, c’est chose plaisante à voir : car le Hobreau, qui est beaucoup plus agile, n’arreste guere à l’avoir devancee, & alors elle ha eschappé des deux ennemis qui la combatent : Et si le Hobreau la prend, lors ce Jan le blanc l’entreprent contre le Hobreau : & combien que le Hobreau soit sans comparaison le plus viste, si est-ce que nous sommes trouvez voyants un tel combat, ou le Hobreau, apres avoir prins l’Allouëtte, fut acroché du Jan le blanc, & tumbants touts deux à terre furent prins liez les uns aux autres : qui nous fait dire que leur inimitié est mortelle. Onc ne nous ha esté possible sçavoir, pourquoy on le nomme l’oyseau saint Martin.

Des oyseaux de proyë, servants à la fauconnerië.
CHAP. XIII.


IL EST manifeste que la science de fauconnerië ha esté mise en art depuis peu de temps. Les autheurs anciens, admirateurs des choses haultaines n’eussent laissé en arriere si grande industrie du sçavoir de l’homme, de leurrer, & aprivoiser les oyseaux de proyë, qu’ils ne l’eussent escrit, si elle eust lors esté en usage : Car c’est merveille de voir un oyseau qui ha esté sauvage ja aprivoisé, fondre du Ciël, & retourner sur le poing de son maistre. C’est une science qui est maintenant si fort ennoblie, que les grands seigneurs se la sont voulu dedier, & reserver pour leur passetemps, tellement que si un gentil homme est ignorant de ceste science, la noblesse Françoyse l’en prise moins, d’autant qu’elle est reduicte à ce point, qu’apres les armes, il n’est rien plus haultain & magnanime, que de la sçavoir, avec la venerië. C’est de lá que ceux qui ont escrit de la fauconnerië desdiants leurs livres aux Princes Françoys n’ont eu rien de plus magnifique, que leur louër les vertus d’un Prince & homme noble, sçavant en l’exercice de la chasse, venerië, & fauconnerië : voulants mettre le principal des exercices d’un homme noble, & d’un Prince en ceste science. Toutesfois nous ne lisons qu’on ait onc loué les vertus d’aucun Prince ancien de telle maniëre. Si entreprenons la description des oyseaux de fauconnerië, ne voulons pretendre toucher ce qui est en la science, mais seulement conferer ceux que trouvons nommez de noms Françoys, & les approprier avec les noms Grecs, & Latins. Touts oyseaux de rapine ne servent pas à la fauconnerië : qui est cause que nous ayons seulement sceu choisir ceux qu’avons trouvez hardis, & de franc courage : car les appropriants pour faire voler, avons fait que la principale distinction eust deux differences nommees par deux termes communs, dont l’un est nommé, voler pour riviere : lautre, voler par les champs, qui est au jugement de tout homme le plus plaisant vol, & qui delecte le mieux. Possible qu’il n’est homme de quelque basse condition, & de gros esprit qui n’admire beaucoup le plaisant vol des Sacres au Milan, & Heron. Nul ne doit penser qu’il y ait aucune autre nation, qui approche en rien en ce deduit de fauconnerië, à nostre façon de faire : car les estrangers n’y veulent faire si grande despence.