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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/161

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semblent estre trompez : car Columelle entend que Miliaris est de grande corpulence, & qu’on lengressoit avec de la graine de Mil à Romme, comme aussi les Cailles, pour les vendre plus chairement. Ceste Cresserelle fait jusques à six petits. On les voit souvent desnicher de quelque haulte tour des villes, ou bien en un creux de chesne sur les orees des bois. Il y ha difference entre le masle & la femelle : car le masle est plus cendré dessus le dos, & la femelle y est plus tachee de noir. Touts deux sont fauves, ou cendrez, madrez de diverses taches noires, & sont presque de la corpulence d’un Mouchet, ayants le bec, les yeux, & la teste de mesme. Les grosses pennes de ses aelles sont communement noires, ayants la queuë moult longue, au bout de laquelle y ha une tache noire en travers. Ses jambes sont asses haultaines, jaulnes, qui n’ont point de tablettes larges, sinon joignant la joincture du pied, & sur les quatre doigts. Aristote parlant de cest oyseau ha monstré qu’il avoit regardé son anatomië interieure : ou il nous fait entendre que son jesier est lasche & large, qui ne ressemble rien qu’à un autre boyau : Car ou les autres l’ont dur & calleux, cestuy l’ha mol comme chair. Les Italiens luy ont donné un nom deshonneste Foutivento : car prenant sa pasture elle se tient en l’aer, ne se bougeant d’une place, ou il semble qu’elle endorme les Souris : toutesfois elle s’y tient à celle fin, que regardant soigneusement le moyen de les prendre à son ayse, elle descende dessus à la despourveuë.

De la grande Pie griesche, que les oyseleurs nomment la blanche.
CHAP. XXIII.


IL y ha deux especes de petits oyseaux de proyë, qui n’ont gueres plus de charnure qu’un Merle, desquels l’un est plus grand, l’autre est plus petit, mais au reste si semblables, qu’ils n’ont difference qu’en la grandeur. Qui vouldroit considerer l’appellation vulgaire de cest oyseau, penseroit qu’on deust entendre que ce fust quelque Pie estrange, venuë du païs de Grece : mais la raison en est autre : c’est que les Françoys voyants cest oyseau assez commun par tout en leurs contrees, ayant les taches blanches par les costez comme une Pie, & ne luy ayants trouvé nom mieux à propos, l’on nommé Pie griesche. Les Italiens le nomment Falconello, comme s’ils disoyent Fauconnette. Aussi est il du nombre des oyseaux de rapine. Celuy qui prendroit le loisir d’en leurrer, le trouveroit de grande entreprinse, & n’estre de moindre courage, que celuy d’un bon Faucon. Aussi est il de si hautain & hardy courage, qu’il ose entreprendre combatre un Merle, & le manger. Ceste grande Pie griesche ha la teste assez grossette & large, ayant grande intervalle entre les deux yeux. Son bec est dur, noir, & grosset, quelque peu recroché par le bout, & ha grande ouverture de bouche. Les pennes de dessus le dos commençants dessus la teste, & suyvants dessus le col jusques à la queuë, sont grises & si finement deliees, qu’il semble que ce soit du poil. Il est blanc par dessous la gorge : mais entre le blanc de la gorge, & le gris de dessus la teste, il ha une ligne de plumes noires, qui commencent des le bec, & de lá suyvant, vont finir celle part, ou commence le col. Il est tout blanc par dessous le ventre, & la