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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/232

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& tendre, se rapportant au goust de celle du Heron. Il semble que Gaza ait eu un exemplaire Grec d’Aristote, different à celuy de l’impression de Venise & Almagne : car en celle clausule Latine ou il dit, Petit lacus & fluvios Junco, Cinclus, Albicula, Tringa, etc : Leukos n’est trouvé es exemplaires Grecs : dont avons voulu amonester le lecteur. Comment qu’il en aille, nostre discours sur la description des Herons blancs, Aigrettes, & Pales, leur demeurera certain, encor qu’il y ait incertitude en leurs appellations antiques.

Du Bihoreau, ou Roupeau espece de Hron.
CHAP. VII.


IL N’EST meilleur moyen pour bien sçavoir si un oyseau est rare ou commun en une province, que quand lon ha trouvé le corps de quelcun au marché, ou se tiennent ceux qui se meslent de vendre les oyseaux : Car le monstrant en presence de plusieurs, chacun en dira ce qu’il en sçait, & selon leur parler, en fera son rapport. Nous avons trouvé un Bihoreau qui est espece de Heron, sur la fin du mois de Mars, qu’on vendoit au marché. Car les oyseaux qu’on prent es païs circonvoisins, sont apportez à la ville pour en avoir argent. Quelques chaircuïtiers le voyants plus petit qu’un Heron, pensoyent que ce fust un Heronneau, toutesfois il en estoit autrement, saçhants que les Herons n’ont encor fait leurs œufs en ce temps lá, & par consequent nuls petits. En ces entrefaictes divers bruits s’eslevoyent, car l’un disoit d’un, & l’autre d’autre. Les uns ne pouvoyent accorder qu’il fust un Bihoreau legitime, mais bastard, nay d’un Heron & d’un Bihoreau : toutesfois ont conclud sur la fin qu’il estoit Bihoreau, mais trouvoyent estrange qu’on en recouvrast en ce temps lá : car comme avons souvent dit, les oyseaux ont leur certaine saison en l’annee, en laquelle lon ha coustume de les voir communement. Et à fin de faire mieux entendre quel oyseau c’est le Bihoreau, on le pourra voir par ceste description. Il est plus grand qu’une Aigrette, mais moindre que un Heron. Ses yeux ont le cercle rouge, & la prunelle noire. Son bec est noir creux & tranchant, comme celuy du Heron. Le dessus de sa teste & du dos est de plumes colorees, comme le dos d’un Vanneau, ayant une ligne blanche commençant depuis l’oeil, & suyvant jusques à l’autre par le devant du front. Et entre les plumes noires de dessus sa teste, sortent d’autres petites plumes blanches longues & deliees, qui fait moult beau voir. Ses aelles sont comme de Heron de moult belle couleur cendree, & aussi est sa queuë, mais tout le dessus & dessous du col, & dessous le ventre, les cuïsses & les plumes de dessous la queuë sont blanches, & ses jambes longues. Il ha la cuïsse denuëe jusques bien hault au dessus du genoil : tant celle partië de la cuïsse que la jambe, sont de couleur jaulnette, tirant sur la couleur paillee. Ses ongles ne sont gueres longs. Les Bihoreaux sont plus communs aux rivages des mers, tant entour la mer de Bretagne, que ailleurs, Ils font leurs nids en lieux de difficile acces entre les rochers. Quant au manger on ne les estime rien moins qu’un Heron, & estre de mesme saveur, & les fault habiller en la mesme maniëre. Nous les nommons aussi Roupeaux, à cause qu’ils se