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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/391

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si duicts de bien observer les oyseaux, qui sont aisez à nourrir, & qui ont bonne voix, qu’ils n’en laissent aucun. Il y en ha plusieurs qui chantent moult bien, mais la difficulté de les nourrir fait qu’on ne les voit aucunement. Et ceste Linote estant facile à eslever, & qui aprent entre touts autres le mieux à parler, il n’y ha village en France, auquel lon n’en puisse bien trouver. Et aussi un autre qui luy est moult semblable qu’on nomme Picaveret, duquel ne voulons faire chapitre à part. Le Picaveret est si semblable à la Linote, que comme lon ha peine à la sçavoir cognoistre & le distinguer, tout ainsi y ha peu d’enseignes qu’on puisse escrire à discerner l’un de l’autre. Ce qui est de plus evident, est le bec de couleur jaulnastre, & & les jambes, & pieds noirs. Au reste sont moult semblables aux Tarines femelles, & de mesme corpulence, & ont mesme madrure es plumes, comme les Linotes. Aussi chantent de mesme maniëre : car ils sont de la mesme espece.

Du Pivoyne.
CHAP. XVII.


A PEINE se trouvera homme de sorte, qui ait tant soit peu estudié en Latin, qui ne sçache que les anciens ont eu les Becafigues, Tours, & Francolins en delices. Encor que nous en ayons en noz contrees, toutesfois sont quasi incognus de nom ancien : car nous n’en faisons tant d’estime, que les estrangers. C’est un oyseau, qui est aussi appellé Sifleur, & en autres endroits de France est nommé un Groulard : qui est nom deu au Traquet, pource qu’il groule sans cesse : & grouller est à dire se remuër. On ne le trouve en toutes saisons de l’annee. Il est oyseau moult privé, & d’assez belle couleur, qui ne vit en grandes troupes : parce on le voit voler la plus part du temps seulet. Il n’est de plus grande corpulence qu’un Bruant. Et pource qu’il y en ha grand quantité en Italie, ils en font grand cas en ce païs la. S’il y en ha quelcun en une forest ou taillis, il se fait ouïr de bien loing par sa voix. Soit qu’on n’en chercheroit en Auvergne, toutesfois nous en avons ouy chanter es forests de Montboissier. Encor avons hommes vivants de ce temps cy, qui feront foy qu’en avons trouvé en quelques contrees de Baviere : avec lesquels avons quelques fois accompagné Valerius Cordus, en ses enquestes sur le naturel des plantes & animaux, par les païs de Boheme, Saxone, & tels autres lieux d’Almagne, que ne voulons specifier. Gaspar Nevius, tresexcellent medecin, qui (à ce qu’on nous ha dit) s’est retiré à Lipse, estoit avec nous en la troupe, en l’an mil cinq cens quarente, & Hieronymus Scribonius. Et de vray les voyages du defunct Cordus, nous ont incité à en entreprendre autres plus loingtains. L’hyver, lors que les Pivoines sont bien gras, ils sont de fort bon manger. Parquoy ceux que lon prend en Italie sont desdiez pour le repas des grands Seigneurs. Or y ha il distinction du masle à la femelle, touts deux ont le bec noir, court, & crochu par le bout, quasi comme les oyseaux de proyë. Cest oyseau estant friant de figues, ha esté nommé pour Sicalis & Ficedula en Latin : pour laquelle chose les Italiens, & Provenceaux quasi à l’imitation des Latins, l’ont appellé Becafighi. Sicalis est diction correspondente à ce qu’on dit, Becafigue : dont Martiel ha parlé en ceste sorte :