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Page:Pierre Belon - L'histoire de la nature des oyseaux.djvu/65

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troysiesme, ha escripte en leur louange : Nullus est alius cibus qui in aegritudine alat, neque oneret, simulque vim potus, & cibi habeat. Car le naturel de l’œuf est d’estre froid & humide, beaucoup plus le blanc que le moyeu, comme il appert en l’appliquant exterieurement sur toutes parties eschaufees. Il est bien vray que pource qu’ils sont faciles à digerer, & sont de grand & bon nourrissement, font le sang subtil. Et de ce en sont confortatifs, & augmentent la matiere spermatique : dont on les pense estre chaulds, & plus les fraiz que les vieux, & mieux ceux des Poulles qui ont esté chauchees que des vierges : toutesfois celle augmentation de semence ne provient de leur naturelle chaleur, ains de leur temperature, & de l’humidité qu’on prend de les avoir mangez. Soit donc conclud, qu’on peut dire des œufs tout ainsi comme lon fait communément des Trufles, Huistres crues, & des Artichaux. Car combien qu’on lise tels mots de l’Artichaut au livre des aliments en Galien : Cinara pravi succi est edulium, praesertim quum plusculum obdurverit. Et enim tunc succum biliosum contient copiosiorem, adeo ut ex ea quidem succus melancholicus ex ipso autem succo tenuis ac biliosus gignatur : Toutesfois il fault noter qu’ils les mangeoyent cruds. Mais maintenant que nous les sçavons moult bien assaisonner, nous voyons communement à l’experience que ceux qui mangent des Artichaux, en sont bien nourriz, tellement que de ce temps chasque grand seigneur fust il malade, ne veult faire repas sans en avoir à son issue de table. Les autres les mangent, pensants que cela leur provoque le desir des femelles, comme à ceux qui se l’incitent en mangeant des œufs fraiz. Plusieurs mettent grand interest en cuisant les œufs pour les trouver meilleurs ou pires : Car mesmement ils prennent divers noms selon diverses cuissons, & en acquerent diverses temperatures. Car ceux qui ont esté cuits en la braise, ne sont tant prisez pour donner aux malades, que s’ils avoyent esté boullis en l’eau : & toutesfois ils sont les plus savoureux. Les œufs que les Grecs nomment Tromita, les François molletz, & les Latins Tremula, sont les mieux estimez, pource qu’ils sont de facile digestion, & engendrent bonnes humeurs. Tels œufs sont des-ja cuicts, mais bien peu. Les autres ont esté nommez Rophita, & en Latin Sorbilia : qui sont ceux que les Françoys pourroyent nommer œufs seulement eschauffez, & qui sont encores liquides, si que la chaleur ne les ha encor espoissis. Tels œufs sont de moindre nourriture, & laschent mieux le ventre. Par cela sont contraires à un estomach debile : car ils provoquent à vomir. Les œufs endurcis d’estre trop cuits sont durs à digerer, de grande nourriture, & engendrent grosses humeurs, comme aussi ceux qu’on ha par trop frits. Les œufs pochez en l’eau sont maintenant bien estimez : comme aussi estoyent anciennement ceux que les Grecs, nommoyent Pincta, qu’on mettoit cuire avec du vin huile & garum, & boullis en un vaisseau qui trempoit en eau boullante. Les œufs des oyseaux de riviere sont cogneuz differents des terrestres, à ce qu’ils ont beaucoup plus de jaulne à la proportion du blanc, que les terrestres. Nature n’ha pas determiné que les oyseaux feissent tel nombre d’œufs, les uns comme les autres : Car il est commun à touts que le Coquu est seul entre les oyseaux qui ne pond qu’un œuf. Il y en ha plusieurs qui n’en ponnent que deux les autres trois, & ainsi consequemment, en sorte qu’ils montent souvent jusques au nombre de quarante. Touts œufs d’oyseaux ont germes conjoincts au moyeu, qui est ce que les Grecs nomment Chalazae, & les Latins Grandines. Lors que nous naviguions sur le Nil, lon nous monstroit les fours, esquels les Aegyptiens font couver