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Page:Pierre Corrard - Le Journal d'une Femme du Monde, 1902.pdf/21

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D'UNE FEMME DU MONDE.

— Ma petite Raymonde, vous êtes bien gentille ; vous avez beaucoup de qualités, mais vous avez un grand défaut : vous écoutez trop votre imagination.

Je lâcherai à l’avenir de lui rogner le bout des ailes.

Pour l’instant, je suis rassurée.

J’avais si peur qu’il ne fùt survenu quelque embarras d’argent à ma famille : ma pauvre maman surtout en aurait bien souffert, elle aime tant le luxe ! Et ce n’est pas sa faute : le tour d’esprit tient en grande partie à l’éducation que l’on a reçue. Ainsi, moi, je sais bien qu’une vie très modeste ne m’effrayerait pas parce que, toute jeune, on m’apprit à mettre en œuvre les ressources inestimables que nous recélons tous, en nous, qui s’y trouvent à l’état latent et qu’il suffit de savoir utiliser. Et puis, au sein même du plus extrême dénuement, mon imagination ne me resterait-elle pas ? N’en déplaise aux bonnes sœurs, et le cas échéant, je lui raccommoderais les ailes, lui rendrais toute liberté, et à défaut des châteaux de mon père, j’en bâtirais bien vite en Espagne.

Grâce à Dieu nous n’en sommes pas là. La vie renait à Clovers, magnifique comme