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Page:Pierre Le Loyer - La Néphélococugie, édition de 1869.djvu/89

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néphélococugie

Car il a imité en cela la nature
De ce grand univers, qui auprès d’elle endure
La froideux et le chault, et le sec, et l’humeur,
Sans lesquelz elle n’a ny force, ny vigueur,
Et ne peut engendrer, ains brehaigne et sterile
Elle se perd soy-mesme et debvient inutile.
Que si vous m’objectez qu’on ne connut jamais
Deux contraires avoir une paisible paix,
Je le confesse bien : toutesfois un contraire,
En son contraire peut se resoudre et deffaire,
Si que le chaut est froid, et le froid est le chaut,
Quand il plaist au motif des cercles de là haut
Le feu se change en air, et l’air en eau se forme,
Et l’eau en terre aussi par le temps se transforme ;
La terre en eau revient, et puis l’eau peu à peu
Se resout dedans l’air, et l’air dedans le feu.
Et bien que le contraire avecques violence
Ne puisse pas si tost alterer sa substance,
Si est-il temperé, et ne deperist point,
Quand il est doucement à son contraire adjoinct.
Le sec est temperé de son contraire humide,
Et l’humide du sec est retenu en bride ;
Le chaut est par le froid fait tiede et moins brûlant,
Et le froid par le chaut debvient morne et plus lent ;
L’eau est tiedie au feu, et Denis le bon pere,
De son vin la chaleur par l’eau froide tempere :
Et comme là le froid et le chaut sont coullez,
Ainsi sont le Cocu et la Caille meslez,
Et du Cocu le froid tempere de sa femme
La bouillonnante ardeur, la chaleur et la flamme,
Et de la Caille aussi les attraitz chaleureux
Temperent le Cocu tremblant et froidureux,
Et l’un et l’autre ensemble en si belle harmonie
Passent joyeusement le reste de leur vie,
Sans que l’un par le froid soit esmeu, et transy,
Et que l’autre du chaut soit embraizé aussi :