Page:Pierre Luguet Une descente au monde sous-terrien 1909.djvu/99

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée

93
une descente au monde sous-terrien

avait sous les yeux un président de République, et se contenta d’esquisser un demi-sourire de pitié.

— Vous ne me croyez pas. Monsieur, poursuivit le haut dignitaire. Il m’est cependant aisé de vous convaincre. Traduisez, si vous pouvez, la phrase suivante. Je vais vous la dire de deux façons, comme on la prononce dans l’air et comme on la prononce dans l’eau. Et je vous prie, à l’avance, de me croire incapable d’une plaisanterie de mauvais goût.

Le président dit alors :

— En l’air : « A matra, parabara katradaça rarapabatra, dapa, sarasarapa, dama.

Puis, ayant annoncé qu’il allait parler dans l’eau, il répéta des lèvres les mêmes articulations, mais sans faire entendre aucun son. On reconnut seulement les syllabes aux mouvements de la bouche.

Van Tratter regardait, médusé. Malgré l’assurance qui venait de lui être donnée, il n’était pas très certain de ne pas servir de jouet au président central. De fait, a matra, parabara, et cœtera, ne disaient rien à sa prodigieuse mémoire, et le discours qu’on venait de prononcer avait été aussi complètement perdu pour lui que si on le lui eut versé de Jupiter ou de Saturne. Kerbiquet, Francken et Lhelma paraissaient d’ailleurs aussi surpris que lui.

— Si j’arais mes dictionnaires… balbutia le vieux savant…

— Vos dictionnaires ne vous seraient ici d’aucun secours, Monsieur Van Tratter ; aucun livre humain ne vous donnera la clef du langage que je viens de parler devant vous, pour cette raison que ce langage, ce n’est pas sur la terre, qu’on en use, mais dessous.