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pellent leurs exploits, ils se souviennent aussi de leurs insuccès. La maladresse qu’ils commettent s’enracine fortement en eux et tend à se reproduire en s’aggravant. Indépendamment de toute nervosité — car les nerfs évidemment ont une tendance à venir compliquer la question — le mouvement qui a échoué une fois est plus difficile à bien renouveler. Quiconque s’adonnera à sauter une barrière en fera l’expérience et l’exemple a ceci de bon qu’il est applicable au cheval aussi bien qu’à l’homme, soulignant ainsi le caractère animal du phénomène.

À toutes les formes de la peur, il est un remède unique : la confiance. L’envers de la peur, c’est le courage ; mais c’est la confiance qui en est l’antidote et cela revient à dire qu’on arrivera rarement à en triompher par le seul effort de la volonté. La volonté réussira parfois à engendrer le courage qui se traduit en actes : elle ne saurait créer la confiance qui est un état d’âme. La confiance, d’ailleurs, ne jaillit point comme peut le faire le courage. Elle s’acquiert par gradation, par accumulation ; elle s’effarouche si on la brusque.

L’exercice physique est, par excellence, une école de confiance précisément parce qu’il comporte un dosage indéfini. On peut toujours abaisser l’obstacle ou graduer le mouvement jusqu’à trouver le point où l’un se franchit, ou l’autre s’accomplit aisément et partir de là pour refouler la peur de plus en plus loin. L’exercice physique possède ainsi le moyen de guérir en grand le mal qu’il provoque en petit. Il agit comme le vaccin.

La peur mécanique peut se manifester dans presque tous les sports mais plus fréquemment et fortement dans les sports d’équilibre que dans les sports de combat. La manière de la traiter est identique : recommencer sans s’énerver, avec une persévérance souple — et en distrayant l’attention autant que possible.

Dans la plupart des exercices, en effet, il y a, physiologiquement, un automatisme à acquérir et, psychologiquement, une crainte à dominer : ainsi, dans la boxe, le détachement de l’épaule et la peur des coups ; dans la natation, l’allongement du corps et la peur d’enfoncer ; dans le cyclisme, l’extension alternative des jambes et la peur de perdre l’équilibre. Les deux éléments se nuisent l’un à l’autre. Les muscles auraient vite compris mais les nerfs s’interposent ; il faut les occuper ailleurs pour faciliter l’automatisme.

Il advient que l’apprentissage d’un sport se trouve ralenti et compliqué par la trop grande attention que l’élève, sollicité à