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études historiques

placés en face de problèmes compliqués et multiples ! Mais tandis que les qualités de François ier et de Charles-Quint leur appartenaient réellement, on vit bientôt que celles d’Henri viii constituaient une façade derrière laquelle il n’y avait que dureté, égoïsme et grossière vanité. L’Angleterre émergeait d’une époque où les appétits avaient longtemps étouffé tout idéal. Le précédent roi, Henri vii, avait su du moins développer le commerce, l’industrie, encourager la marine et remplir les coffres de l’État. Son fils avait la tâche facile. Oxford maintenant aspirait à redevenir un centre de culture. John Colet, Érasme et Thomas More s’y rencontraient. Il n’était pas jusqu’aux architectes qui ne se révélassent prêts à instaurer ce « style Tudor », dont la chapelle de Westminster atteste le remarquable élan initial. Au lieu de s’appliquer à faire fructifier tant de germes heureux, Henri viii se jeta dans l’imbroglio des querelles continentales. Un moment il pensa devenir empereur d’Allemagne ; plus tard, il se vit roi de France. Il finit par se faire pape anglican et termina son existence manquée en apoplectique sanguinaire.

Autour de ces trois figures centrales, se tiennent des comparses de relief inégal mais dont le groupement, comme il arrive, aide à la compréhension générale. Ce ne sont pas à proprement parler des collaborateurs. La seule à mériter ce titre serait la mère de François ier, Louise de Savoie, pleine d’amour, de dévouement et d’orgueil maternels en puisant dans ces sentiments d’ingénieuses inspirations au point qu’on en vient à se demander si ce qu’il y eût de bon dans le gouvernement de son fils ne lui fut pas dû presque exclusivement. François fut d’ailleurs bien servi par son chancelier, Duprat, qui avait dirigé son instruction, homme discret et tout à sa dévotion. Il le fut moins bien par les jeunes seigneurs qui avaient partagé ses jeux et qu’il appela à des postes au-dessus de leurs moyens. L’un d’eux se mua en un traître de marque, le fameux connétable de Bourbon qu’il avait eu l’imprudence d’investir de cette charge supérieure restée vacante depuis 1488 et qu’il commît la maladresse de laisser échapper quand on pouvait encore se saisir de sa personne.

Charles-Quint n’eut point de confident attitré si l’on en excepte dans les tout premiers temps ceux qui avaient dirigé son éducation d’orphelin, à savoir, l’évêque d’Utrecht qui devait devenir pape sous le nom d’Adrien vi, et le comte de Croy, gouverneur des Pays-Bas et très porté à tout subordonner à l’intérêt flamand, par conséquent à maintenir la bonne intelligence avec la