Page:Pierre de Coubertin - Chronique de France, 1902.djvu/146

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.
136
la chronique

sénateur. Quel autre Français incarna à ce point tout un siècle de l’existence de sa patrie ?

Ces quelques réflexions suffisent à mettre en relief une qualité dont le temps ne peut manquer de faire un défaut. Toute l’œuvre de Victor Hugo est imprégnée d’actualité. Elle l’est à ce point que les historiens futurs y verront un guide obligatoire à travers le dédale des illusions et des revirements de la France du xixe siècle. Ils consulteront ce miroir unique qui leur renverra l’image exacte d’un pays et d’une époque. Mais, hormis les historiens, qui viendra ? La foule cherchera-t-elle autour de cette grande mémoire le rappel des bases immuables, des assises primordiales de la société ? Lui demandera-t-elle un écho de ces passions permanentes qui n’ont ni date ni nationalité ? Non, sans doute. Les génies universels s’asseoient solitaires et silencieux, au revers des hautes montagnes, sans souci de la clameur présente ni des événements immédiats ; on les écoute peu de leur vivant mais ils dominent après leur mort. Ceux qui, descendus dans les vallées, réclament avec vigueur leur part de la vie collective et se mêlent à toutes les luttes contemporaines condamnent par là même leur œuvre à se contenter