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Page:Pierre de Coubertin - Chronique de France, 1902.djvu/83

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de france

tout relevés les traces : l’obéissance pouvant aller jusqu’à l’abdication totale et la révolte confinant parfois à l’absurde. Nous n’arrivons pas à nous passer de l’État : nous ne cessons de faire appel à lui et de réclamer son intervention quitte à lui reprocher aussitôt chacune de ses ingérences et à nous lamenter du joug pesant qu’il nous impose. Nous plaçons en lui une confiance démesurée et nous lui vouons en même temps des haines imméritées. Nous n’attendons de lui ni de grandes clartés intellectuelles ni une direction morale quelconque, mais nous apprécions par dessus tout en lui l’unité administrative. Est-ce Louis XIV qui a incrusté dans l’âme Française cet idéal un peu bourgeois ? Probablement, car depuis son règne nous n’avons cessé de nous en inspirer ; c’est par là que les violences révolutionnaires puis la tyrannie Napoléonienne se sont fait respecter — et presque aimer ; on y voyait un instrument brutal mais certain d’unification administrative. Que la machine nationale marche sans secousses, d’un beau mouvement bien uniforme et bien réglé, les Français se sentent heureux et fiers ; ils se croient l’objet de l’admiration universelle. C’est pourquoi, dans leurs conceptions politiques,