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la chronique

d’ordre, de régularité et de justice que chez le préfet du département. Et pour pape comme pour chef de l’État, l’on souhaite un homme fin, avisé, maître de lui, ayant de l’habileté et du sang-froid. Dans la hiérarchie religieuse, le Français redoute les « Saints » autant qu’il craint les « génies » dans la hiérarchie politique : la piété intense l’effraye chez son curé aussi bien que la foi ardente chez son évêque ou le prophétisme inspiré chez le pape. Il préférera mille fois l’imitateur médiocre d’un Léon xiii à l’héritier génial d’un Pie ix ; il sait gré au Pontife actuel de n’avoir rien ajouté au fardeau des croyances obligatoires et il en veut, au contraire, à son prédécesseur d’être tombé dans ce regrettable anachronisme, encore que les derniers dogmes ne l’aient point troublé ; l’Infaillibilité est une arme de parade dont on osera bien rarement se servir ; la proclamation de l’Immaculée Conception, article de foi, n’a rien changé au culte de la Vierge, dévotion très Française. Quant au Syllabus, on peut dire, sans exagération, qu’il n’y a pas deux catholiques Français sur mille qui sachent en quoi il consiste, ni dix prêtres sur cent qui soient à même de l’expliquer.