Page:Pierre de Coubertin - Chronique de France, 1905.djvu/176

La bibliothèque libre.
Cette page n’a pas encore été corrigée
164
la chronique

villes modernes en Afrique n’aurait-elle pas excédé les ressources des budgets ? Il est évident qu’il eût fallu recourir au moyen adopté par les anciens qui n’étaient pas plus désireux que nous d’obérer inutilement leurs finances. Ce moyen c’était la main-d’œuvre militaire — et ici s’accuse une deuxième infériorité. Les Français n’ont point su tirer des 60.000 hommes qu’ils entretiennent en Afrique un parti équivalent à ce que les Romains obtinrent de leurs 30.000 soldats ; car c’est aux environs de ce chiffre que, d’après le savant historien Mommsen, la critique se tient. La légion a constitué non pas seulement l’une des plus durables mais aussi des plus audacieuses institutions du monde romain. Elle a poussé la permanence aussi loin qu’elle peut être poussée puisque la profession a fini par devenir héréditaire et que les enfants des légionnaires ont succédé à leurs pères ; son patriotisme, sa fidélité et son ardeur au travail n’en ont point souffert. Elle a atteint aux extrêmes limites du libéralisme puisque les soldats ont eu permission d’avoir leur foyer aux portes de la caserne et d’y vivre en famille hors des heures de service ; la discipline pourtant est demeurée saine et stricte. Enfin elle a étendu le cercle de