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le roman d’un rallié

bizarrement tatoué par le découpage noir des feuillages qu’éclairent, de haut, des lunes électriques énormes, puis la rentrée dans la petite chambre d’hôtel qui sent l’hôte d’un jour, avec les malles restées fermées et la chaise de bord repliée dans un coin, évocation des longues traversées — tout cela lui revient, mêlé au rappel d’une nuit agitée, coupée de brusques et fréquents réveils, d’alertes agaçantes, provoquées par une crainte nerveuse de manquer le paquebot.

Il y est enfin, sur ce paquebot. Le dernier câble qui le rattachait au rivage vient d’être filé. La Champagne descend l’Hudson lentement avec un luxe de sifflets stridents. Là-bas, sur le wharf, on voit des petits drapeaux Français et Américains qui s’agitent, des mouchoirs qui disent adieu, des chapeaux qui se démènent en l’air, toutes les manifestations émues qui accompagnent les départs maritimes, bien autrement solennels que ceux dont une gare de chemin de fer est le théâtre ; les voyageurs que le navire imprudent et superbe entraîne vers la pleine mer ont bien 99 chances sur 100 d’arriver à bon port ;