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le roman d’un rallié

de Kerarvro et jusque dans les cantons voisins, madame de Crussène était, sinon très aimée, du moins admirée et respectée de tous.

Mais les paysans qui, devant elle, se sentaient intimidés, gardaient leur tendresse pour Étienne, pour le petit garçon vif et remuant qui parlait leur langue avant de savoir un mot de Français et s’en servait pour leur dire des choses gentilles et drôles. Étienne, de bonne heure, accusa un caractère bien à lui ; il ne rappelait son père en aucune façon ; sûrement il ne lui ressemblerait pas, n’aurait jamais son humeur égale, sa douceur de langage et sa quiétude d’esprit. La marquise lui en voulut d’abord, comme d’une désillusion pénible ; elle s’était attendue à voir revivre en son fils celui dont elle ne cessait de pleurer l’absence et se sentait souvent désorientée en face de ce petit Breton dont elle comprenait les longs silences moins encore que les accès d’effervescence sauvage. Mais l’enfant était si attachant qu’en plus de son dévouement, elle lui donna bientôt tout son cœur, et un peu de joie lui revint à le regarder grandir.