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notes athéniennes.

impérial dont elle a vécu pendant les siècles d’esclavage, qui a soutenu son courage aux heures d’angoisse, qui l’a doucement hypnotisée pendant sa convalescence et qui demeure, envers et contre tous, son principal motif de travailler et d’aimer la vie. L’occidentaliser, c’est-à-dire la forcer à s’asseoir parmi des étrangers qui ne la comprennent pas, l’obliger à prendre parmi les nations la dernière et la plus petite place, et torturer l’esprit de ses fils pour y éteindre les grandes lueurs empourprées et y allumer les petites flammes mesquines de nos conventions routinières.

Il y avait un meilleur usage à faire de la liberté ; et vraiment les raisins secs et les crises ministérielles ne pouvaient contenter des Hellènes dont le sol recélait les splendeurs du génie antique et dont l’histoire est tissée de pensées grandioses et d’ambitions sans bornes. Pourquoi ont-ils laissé à d’autres le soin d’exhumer et de classer ces chefs-d’œuvre et pourquoi, aujourd’hui encore, leurs annales renferment-elles tant de lacunes ? Pourquoi reste-t-il tant de chapitres à écrire, tant de documents à analyser ?… Les fondateurs du royaume en eurent comme l’intuition lorsqu’ils prirent Athènes pour capitale : Athènes isolée et ruinée au lieu de Patras, que leur conseillait l’Europe, à cause de sa belle situation sur le golfe et de son avenir commercial. Mais il fallait mener l’idée jusqu’au bout et remettre l’avenir, sans hésitation ni réserve, aux mains divines des lettres et des arts.

À l’ombre des murailles de son université qui pouvait devenir, en vingt ans, la première du monde,