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POÉSIE CHOLIAMBIQUE. PARODIE. APOLOGUE.

dans cette bluette agréable, n’a d’objet qu’elle-même. Toute la valeur d’une telle œuvre est dans le piquant contraste du fond et de la forme, dans le charme des détails, dans la vivacité des expressions et des tournures, dans l’art surtout avec lequel la fable est soutenue et conclut.

Le rat Pille-Miettes, qui vient d’échapper à la dent d’une belette ou d’un chat, s’arrête près d’un marais pour se désaltérer, car il a couru fort et longtemps. Joufflue, reine des grenouilles, entre en conversation avec lui. Elle lui persuade de venir dans son palais ; et c’est sur son dos qu’elle le prend pour l’y transporter. La nouveauté du voyage enchante d’abord Pille-Miettes, mais sa joie n’est pas de longue durée. Une hydre apparaît sur les eaux : Joufflue effrayée plonge au fond ; Pille-Miettes, malgré ses efforts, périt submergé par les vagues, en dévouant Joufflue aux dieux vengeurs. Un rat, qui se trouvait sur le rivage, court annoncer au peuple rat la triste fin de Pille-Miettes. Une assemblée générale est convoquée ; et là, sur la proposition de Ronge-Pain, père de la victime, on se décide à faire la guerre aux grenouilles. Tout s’arme, et le héraut Fouille-Marmite est chargé de dénoncer les hostilités. Joufflue se déclare parfaitement innocente et même ignorante de la mort de Pille-Miettes. Entraînées par elle, les grenouilles se préparent à faire une vigoureuse résistance. Cependant les dieux, dans l’Olympe, s’inquiètent de cette agitation qu’ils remarquent sur la terre. Mais Minerve opine pour que personne ne descende, et tous les dieux se bornent au rôle de spectateurs. Bientôt la mêlée s’engage, terrible, acharnée, et avec des chances diverses. A la fin, les rats l’emportent, et Avale-Tout ne parle de rien moins que d’exterminer toute la gent batracienne. Alors Jupiter n’y tient plus. Il veut envoyer Pallas ou Mars, pour arrêter le féroce Avale-Tout. Mars recule devant cette rude besogne. Jupiter prend en main la foudre, mais la foudre elle-même est impuissante. Effrayés un instant, les vainqueurs se remettent bien vite de leur peur, et recommencent leurs exploits de plus belle. Jupiter fait avancer une autre armée contre la leur, des guerriers munis par la nature d’armes défensives et offensives, et qui