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CHAPITRE XXXII.


CHAPITRE XXXII.

ORATEURS DU QUATRIÈME SIÈCLE AVANT J. C.


Isocrate. — La rhétorique d’Aristote et la rhétorique d’Isocrate. — Isocrate orateur. — L’Antidosis. — Isée. — Lycurgue d’Athènes. — Hypéride. — Dinarque. — Démade. — Phocion.

Isocrate.


Je reviens aux orateurs. Le premier nom que je rencontre est celui d’un homme qui fut moins orateur peut-être que ne l’avait été Lysias, et dont nul orateur, chez les Grecs, n’égala, ne balança même la renommée. Isocrate n’est qu’un sophiste, le plus habile si l’on veut, le plus savant et le plus honnête de tous, mais toujours et partout un sophiste, même quand il accable les sophistes de ses injures.

Isocrate naquit en l’an 436 avant notre ère. Ses premiers maîtres furent des sophistes, Gorgias, Prodicus et d’autres. Socrate, qu’il suivit assez tard, fut impuissant à effacer de son esprit l’empreinte de funestes doctrines, et ne parvint à en faire ni un philosophe ni un sage. Il demeura toute sa vie un homme avide d’argent, de plaisirs et de réputation, et, ce semble, un politique sans principes bien arrêtés, pour ne pas dire vil et mercenaire. Il se destinait aux magistratures ; mais la faiblesse de sa voix et la timidité insurmontable de son caractère lui interdirent l’accès de la tribune. Pour se dédommager de cet inconvénient, et pour réparer les brèches que la guerre du Péloponnèse avait faites à son patrimoine, il ouvrit une école d’éloquence. Il se fit rhéteur, comme nous dirions ; mais les Grecs n’avaient qu’un seul mot pour désigner le rhéteur et l’orateur véritable. On le nommait donc Isocrate l’orateur. Il eut bientôt de nombreux disciples. Il écrivait des discours sur toute sorte de sujets, et particulièrement des plaidoyers. Il entretenait une brillante et lucrative correspondance avec les rois de Cypre et de Macédoine. Leçons, discours ou lettres, il faisait tout payer à