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CHAPITRE L.

avec cette verve, avec cette spirituelle vivacité, ni surtout avec ce bon goût classique et cette pureté de diction, peu s’en faut irréprochables.


Julien et la Gaule.


Il n’y a pas, dans toute la littérature grecque, un auteur dont la lecture soit plus intéressante pour nous ; je dis pour des Français, pour des Parisiens. C’est en défendant la Gaule contre les barbares que Julien conquit sa gloire militaire. C’est près de Lutèce, au palais des Thermes, que Julien fut proclamé empereur. C’est dans un écrit de Julien qu’on trouve le premier tableau de ce qui fut plus tard Paris. Qui de nous pourrait être indifférent devant une page comme celle que je vais transcrire ?

« J’étais alors en quartiers d’hiver près de ma chère Lutèce. Les Celtes appellent ainsi la petite ville des Parisii. C’est un îlot jeté sur le fleuve, qui l’enveloppe de toutes parts. Des ponts de bois y conduisent de deux côtés. Le fleuve diminue ou grossit rarement ; il est presque toujours au même niveau, été comme hiver ; l’eau qu’il fournit est très-agréable et très-limpide à voir et à qui veut boire. Comme c’est une île, les habitants sont forcés de puiser leur eau dans le fleuve. L’hiver y est très-doux, à cause de la chaleur, dit-on, de l’Océan, dont on n’est pas à plus de neuf cents stades, et qui peut-être répand jusque-là quelque douce vapeur : or, il paraît que l’eau de mer est plus chaude que l’eau douce. Que ce soit cette cause, ou quelque autre qui m’est inconnue, le fait n’en est pas moins réel : les habitants de ce pays ont de plus tièdes hivers. Il y pousse de bonnes vignes, et quelques-uns se sont ingéniés d’avoir des figuiers, en les entourant, pendant l’hiver, comme d’un manteau de paille ou de tout autre objet, qui sert à préserver les arbres des injures de l’air. » C’est aux habitants d’Antioche que Julien parle de Lutèce, à propos de la rude vie qu’il menait en Gaule, et dont il oppose le tableau, dans le Misopogon, aux mœurs sensuelles et efféminées de la cité orientale.

Le récit de la révolte des légions contre Constance est trop