Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/171

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Un prince, avec une puissance bornée, peut avoir plus de crédit dans l’Europe qu’un roi très grand par lui-même, et absolu chez lui. La puissance de celui-ci pourroit seule être un obstacle à ce crédit. Il n’y a point de siècle qui n’en ait fourni des exemples, et l’on a vu quelquefois des particuliers l’emporter à cet égard sur des souverains.

Heinsius, grand pensionnaire de Hollande, avoit autant ou plus de crédit que les princes de son temps, pendant la guerre de la succession d’Espagne. L’abus qu’il en fit ruina sa patrie.

Je n’entrerai pas là-dessus dans un détail étranger à mon sujet ; je ne veux considérer que ce qui a rapport à de simples particuliers.

Le crédit est donc la relation du besoin à la puissance, soit qu’on la réclame pour soi ou pour autrui ; avec la distinction, qu’obtenir un service pour autrui, c’est crédit ; l’obtenir pour soi-même, ce n’est que faveur.

Le crédit n’est donc pas extrêmement flatteur par sa nature ; mais il peut l’être par ses principes et par ses effets. Ses principes sont l’estime et la considération personnelle dont on jouit, l’inclination dont on est l’objet, l’intérêt qu’on présente, ou la crainte qu’on inspire.

Le crédit fondé sur l’estime est celui dont on devroit être le plus flatté, et il pourroit être re-