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CHAPITRE IX.

Sur le ridicule, la singularité et l’affectation.


Le ridicule ressemble souvent à ces fantômes qui n’existent que pour ceux qui y croient. Plus un mot abstrait est en usage, moins l’idée en est fixe, parce que chacun l’étend, la restreint ou la change ; et l’on ne s’aperçoit de la différence des principes que par celle des conséquences et des applications qu’on en fait. Si l’on vouloit définir les mots que l’on comprend le moins, il faudroit définir ceux dont on se sert le plus.

Le ridicule consiste à choquer la mode ou l’opinion, et communément on les confond assez avec la raison ; cependant ce qui est contre la raison est sottise ou folie ; contre l’équité c’est crime. Le ridicule ne devroit donc avoir lieu que dans les choses indifférentes par elles-mêmes, et consacrées par la mode. Les habits, le langage, les manières, le maintien ; voilà son domaine, son ressort : voici son usurpation.

Comme la mode est parmi nous la raison par excellence, nous jugeons des actions, des idées et des sentimens sur leur rapport avec la mode. Tout ce qui n’y est pas conforme est trouvé ri-