Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 1.djvu/217

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trop, et c’est un malheur pour les lettres : ils se produisent peu dans le monde qui ne leur convient guère, et à qui ils ne conviennent pas davantage.

Il y a un autre ordre de savans qui s’occupent des sciences exactes. On les estime, on en reconnaît l’utilité, on les récompense quelquefois ; leur nom est cependant plus à la mode que leur personne, à moins qu’ils n’aient d’autres agrémens que le mérite qui fait leur célébrité.

Les gens de lettres les plus recherchés sont ceux qu’on appelle communément beaux-esprits, entre lesquels il y a encore mie distinction à faire. Ceux dont les talens sont marqués et couronnés par des succès, sont bientôt connus et accueillis ; mais si leur esprit se trouve renfermé dans la sphère du talent, quelque génie qu’on y reconnoisse, on applaudit l’ouvrage, et on néglige l’auteur. On lui préfère, dans la société, celui dont l’esprit est d’un usage plus varié, et d’une application moins décidée, mais plus étendue.

Les premiers font plus d’honneur à leur siècle ; mais on cherche dans la société ce qui plaît davantage. D’ailleurs il y a compensation sur tout. De grands talens ne supposent pas toujours un grand fonds d’esprit : un petit volume d’eau peut fournir un jet plus brillant qu’un ruisseau dont