Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/104

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considération. Par le genre de vie que j’ai embrasse, je me suis fait d’avance une retraite honorable, lorsqu’il ne me sera plus permis de prétendre ni à la jeunesse, ni à la beauté. Une femme n’a point alors d’autre parti à prendre que le bel esprit ou la dévotion ; le dernier parti est trop contraire à mon goût, et je ne le soutiendrais pas ; au lieu qu’en embrassant celui du bel esprit, je puis jouir dès aujourd’hui de la considération, sans être obligée de renoncer aux plaisirs dans lesquels je veux apporter toute la décence possible. Il y a peu de femmes qui ne fussent flattées de votre hommage, et qui peut-être n’en fissent gloire ; pour moi, en prenant un amant, je n’en veux pas l’éclat. J’approuvai le plan de madame de Tonins ; je me jetai à ses genoux, et je lui promis une discrétion inviolable, si elle m’accordoit ses bontés. Doucement, monsieur, me dit-elle ; il faut que votre conduite me prouve vos sentimens. Dans ce moment il arriva du monde, et je sortis. J’allai quinze jours de suite chez madame de Tonins sans pouvoir vaincre sa résistance. Elle crut à la fin mon amour si sincère qu’elle consentit à me rendre heureux. Nous vécûmes ensemble dans le plus grand mystère pendant près d’un mois ; la société s’aperçut enfin de notre intelligence, et me marqua sur-le-champ autant d’égards que madame de Tonins