Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/30

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diamans d’un assez grand prix qu’elle me força d’accepter. J’y fus obligé ; car la plus grande offense que l’on puisse faire à un Espagnol, c’est de refuser ce qu’il offre : je la reçus donc en baisant mille fois la main qui me la donnoit, et je montai seul dans la calèche, qui me conduisit à l’endroit où je l’avois trouvée la veille.

Le lendemain, à mon réveil, je reçus une lettre d’Antonia ; ce fut un Maure qui me l’apporta. Elle étoit tendre et passionnée : Antonia me prioit de me promener le soir à cheval sur la grande place. Je vous verrai sans être vue, ajoutoit-elle, et je jouirai avec plaisir de l’inquiétude où vous serez de ne me point apercevoir. Clara vous dira demain, à la grande église, quand et de quelle façon nous pourrons nous revoir. J’exécutai les ordres que l’on m’avoit donnés. Après avoir regardé inutilement à toutes les jalousies, je revins chez moi m’occuper de mon aventure. Le jour suivant, je trouvai Clara dans l’église que l’on m’avoit indiquée, qui me dit, en feignant de prier Dieu : Rendez-vous à cheval, au jour tombant, et sans suite, derrière les murs du couvent de St-François ; le Maure que vous avez vu hier, s’y trouvera monté sur une mule ; vous n’aurez qu’à le suivre. Je fus exact au rendez-vous : j’y trouvai le Maure, il observa toujours le plus profond silence, et nous ar-