Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/32

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gnard. Il se jeta si promptement sur Antonia, que je ne pus l’empêcher de lui porter deux coups qui la firent tomber à mes pieds ; j’avois des pistolets de poche, je cassai la tête à celui qui venoit de blesser Antonia, et je tins en respect ceux qui l’accompagnoient. Elle me tendit les bras, et me dit d’une voix mourante : Qu’avez-vous fait, seigneur ! vous avez tué mon mari. Les deux valets, occupés à donner du secours à leur maître, me donnèrent le temps de prendre Antonia dans mes bras, et de gagner la porte du cabinet. Je descendis sans obstacle, je trouvai le Maure qui m’attendoit avec mon cheval ; il m’aida à prendre Antonia devant moi, et je m’éloignai de ce funeste lieu sans savoir où j’allois. Je m’abandonnai à la vitesse de mon cheval.

Cependant Antonia ne donnant aucun signe de vie, je m’arrêtai pour lui donner quelques secours ; mes soins la firent revenir à la vie : Quoi ! c’est vous, me dit-elle, en ouvrant les yeux ! vous vivez, tous mes malheurs ne me touchent plus. Il n’y a point de grâce à espérer ni pour vous ni pour moi ; le rang et la dignité de mon mari vous attireront des ennemis sans nombre ; c’est le marquis de Falamos que vous avez tué. Je n’ai d’autre ressource que mon frère, il a un château peu éloigné d’ici, prenons-en le chemin, il ne me refusera pas un asile. Je re-