Page:Pinot Duclos - Œuvres complètes, tome 8.djvu/45

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s’étoit passe entre nous ; mais je remarquai combien la vanité d’un intendant a quelquefois à souffrir dans une ville qui sert si parfaitement à corriger les fatuités subalternes.

Après avoir quitté ***, je parcourus toute l’Italie : je n’oubliai rien de tout ce qui pouvoit intéresser la curiosité, et me faire retirer le fruit de mes voyages. Je m’attachai particulièrement à éviter tout ce qui décrie la jeunesse françoise. J’étois sur-tout en garde contre le danger des courtisanes ; et je serois, je crois, revenu sans connoître les Italiennes, si une aventure qui m’arriva à Venise, ne m’en eût procuré l’occasion.

Une femme jeune, belle et bien faite, qui se nommoit la signora Marcella, m’y retint trois mois dans les plaisirs les plus vifs. Il n’y a point de pays où la galanterie soit plus commune qu’en France ; mais les emportemens de l’amour ne se trouvent qu’avec les Italiennes. L’amour, qui fait l’amusement des Françoises, est la plus importante affaire et l’unique occupation d’une Italienne. Au lieu de raconter moi-même cette aventure, je joindrai ici une lettre que Marcella écrivit, quelques jours après mon départ de Venise, à une de ses amies, et que celle-ci me renvoya ; on y verra des circonstances que j’omettrois comme frivoles, et qui sont trop importantes pour qu’une Italienne les oublie.