Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 7.djvu/23

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communauté de ses vues avec celles du cabinet de Londres, il intrigue en secret, tantôt d’accord avec lui, tantôt par des agents comme Flahaut, pour obtenir soit le Luxembourg, soit Mariembourg et Philippeville. Il feint de ne pouvoir se dérober aux supplications des Belges, prêts, fait-il dire, à se jeter dans les bras de la France. Ce sont des avances et des retraites perpétuelles, des repentirs suivis de nouvelles tentatives, bref, la politique d’expédients d’un roi tâchant vainement à contenter tout le monde et dont les intrigues ne parviennent pas à fléchir l’orgueilleuse obstination de l’Angleterre.

Car en face des Puissances absolutistes, Louis-Philippe avait trop grand besoin de l’Angleterre pour pouvoir songer à rompre avec elle. C’est là ce qui a permis à Palmerston de diriger à sa guise les travaux de la Conférence. Il a su jouer admirablement, dans l’intérêt de la politique britannique, tantôt de la France contre la Prusse, l’Autriche et la Russie, tantôt de celles-ci contre la France. Avec la première, il ne voulait pas contraindre les Belges au profit de Guillaume, mais avec les secondes il était inébranlablement résolu à empêcher la France de mettre la main sur la Belgique. Il misait à coup sûr et devait gagner en tout cas. Le rôle que lord Castlereagh avait joué en 1814-1815, il le joua en 1830-1831, si bien que la création et la dissolution du royaume des Pays-Bas furent avant tout l’œuvre de l’Angleterre.

La guerre générale, que la grande affaire des Puissances était et fut jusqu’au bout d’éviter, eût éclaté inévitablement, s’il n’eût tenu qu’aux Belges et à Guillaume. La réunion de la Conférence de Londres les avait également exaspérés. Pour celui-ci, elle constituait la violation de ses droits de souverain, pour ceux-là la violation de leurs droits de peuple. Lui, comme eux, s’indignaient d’être passés « sous le joug de la diplomatie ». Ils se défiaient avec raison des marchandages dont à l’avance ils se voyaient les victimes, et auxquels ils eussent préféré la solution nette et franche d’un conflit armé que, de part et d’autre, ils comptaient bien exploiter à leur profit.

Guillaume, chef d’un gouvernement régulier et certain de la