Page:Pirenne – Histoire de Belgique – Tome 7.djvu/97

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tats bienfaisants en tirant le pays de la paralysie industrielle qui l’accablait. Des commandes ininterrompues assurèrent l’avenir compromis de la métallurgie, et le renouveau de son activité provoqua celui des mines de fer et de charbon. La confiance renaissante suscite les initiatives du capitalisme. La Société Générale, sortant de la réserve qu’elle avait conservée depuis la Révolution, commence à prendre le caractère inconnu jusque-là d’une banque industrielle[1]. Elle s’intéresse à la création d’usines, favorise le mouvement de concentration qui, dans le Hainaut, fait passer rapidement les petites houillères de famille sous la direction de sociétés puissantes, pousse à la formation de sociétés anonymes qu’elle dirige ou qu’elle « contrôle ». La Banque de Belgique et la Banque Liégeoise, fondées en 1835 en partie grâce à des capitaux français qu’attire l’essor du pays, imitent son activité et ses méthodes. D’année en année le nombre des sociétés anonymes, favorisées par la liberté presque complète que la loi leur abandonne, grandit avec une rapidité surprenante. De 15 en 1830, il monte à 151 de 1833 à 1839[2].

Le traité de 1833, en dissipant la crainte d’une reprise d’hostilités immédiate avec la Hollande, a été certainement pour beaucoup dans cette pullulation d’affaires nouvelles. Elle présente au surplus un caractère fébrile qui la rend plus brillante qu’elle n’est solide. La plupart du temps, les titres mis en circulation ne se placent pas dans le public et se concentrent aux mains de professionnels de la spéculation, dont beaucoup ne se soutiennent que par le crédit. Il faut reconnaître cependant qu’une impulsion salutaire s’est emparée du pays. En 1815, c’est grâce à l’appui du gouvernement qu’il s’était relevé de la crise consécutive à l’effondrement de l’Empire. Cette fois, son réveil n’eut d’autres causes que sa propre énergie se développant dans la liberté. Si l’État construit les chemins de fer, il n’apporte aucun concours aux affaires. La même liberté imprègne la vie économique et la vie publique et son succès

  1. B. S. Chlepner, La Banque en Belgique, p. 74 et suiv. (Bruxelles, 1926).
  2. Chlepner, op. cit., p. 58 et suiv.