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Page:Piron - Poésies badines et facétieuses, 1800.djvu/76

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Sur ton beau sein je mourais pour renaître ;
Et pour mourir, toujours je renaissais.
Bien différente en ceci d’une reine.
Qui veut toujours qu’on fasse tous les frais,
Pour le plaisir tu partageais la peine,
Et par la peine au plaisir tu gagnais.
Dieux ! quel moment ! je vois ta belle bouche,
Belle toujours, surtout quand on y touche :
Je vois tes yeux embellis par ces pleurs,
Que le plaisir, tu le sais, fait répandre ;
Nuages doux, amoureuses vapeurs,
Dans tes beaux yeux, mêlés d’un feu si tendre !
J’entends encor ces soupirs enchanteurs,
Et ces baisers que mes lèvres errantes,
venaient chercher sur tes lèvres brûlantes,
Où le plaisir confondait nos deux cœurs !
Ces demi-mots du désir qui s’éveille ;
Ces sons touchants soudain interrompus.
Plus éloquents, pour être suspendus,
Viennent toujours caresser mon oreille !…
Je viens de rire, et je vais m’ennuyer.
Ah ! c’en est fait, la force m’abandonne !…
J’entends déjà le maudit écuyer………
Adieu, Glycère : adieu ; je vais bailler
Bien tendrement sur les degrés du trône.
Vole par jour vingt mille libertés ;
Fais-moi par jour vingt infidélités,
Cent, si tu peux ; va, je te le pardonne :
Dupe les vieux et ruine les sots.
Conserve bien ta trop friponne mine,
Puis, garde-toi de perdre tes défauts ;
Sois toujours belle et toujours bien coquine !…