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deux constantes en s’appuyant sur la loi du rayonnement, j’avais un moyen de vérifier si tout ce qui avait été fait antérieurement n’était pas qu’un simple artifice de calcul et s’il convenait de lui attribuer un sens physique. La première constante a un caractère plutôt formel et elle est en rapport avec la définition de la température. Si l’on définit la température comme étant l’énergie cinétique moyenne d’une molécule d’un gaz parfait, énergie qui est en soi extrêmement faible, la constante en question a pour valeur deux tiers[1]. Par contre, si l’on adopte l’échelle conventionnelle des températures, la même constante prend une valeur extrêmement faible et cette valeur est naturellement très étroitement liée à l’énergie d’une molécule unique. La connaissance de cette constante est donc une étape dans le calcul de la masse d’une molécule et de toutes les grandeurs qui s’y rattachent. La constante en question a souvent été nommée constante de Boltzmann, bien qu’à ma connaissance, Boltzmann ne l’ait jamais introduite dans ses calculs, ce qui, entre parenthèses, à défaut d’affirmations explicites de sa part[2], suffirait à prouver que Boltzmann ne croyait pas du tout qu’il fût possible de mesurer exactement cette constante. Je ne crois pas qu’il soit possible de trouver un exemple plus saisissant des progrès gigantesques accomplis par l’art de l’expérimentation, que cette découverte de toute une série de méthodes pour mesurer la masse d’une molécule et cela avec une exactitude presque égale à celle avec laquelle on mesure la masse d’une planète.

À l’époque où j’effectuais mes calculs en m’appuyant sur la loi du rayonnement, on ne pouvait penser à une vérification exacte du nombre obtenu, la seule chose possible était de voir si l’ordre de grandeur trouvé correspondait bien à la réalité. Mais bientôt Rutherford et Geiger[3], en dénombrant directement les particules du radium, calculaient la valeur de la charge électrostatique de ces particules et la trouvaient égale à 4,65 × 10−10 unités électrostatiques. Or, de mon côté, j’avais trouvé 4,69 × 10−10, je considérais donc ce résultat comme une confirmation décisive de la valeur de ma théorie. Il convient cependant de signaler que par des méthodes plus récentes E. Regener

  1. La formule générale qui donne l’énergie moyenne d’une molécule de gaz est, si représente la première constante du rayonnement
    .

    Si l’on pose on a . Par contre dans l’échelle conventionnelle des températures (absolues selon Kelvin), est défini de telle façon que ta différence de température entre l’eau bouillante et la glace fondante est posée égale à 100.

  2. Cf. par ex. L. Boltzmann : « En souvenir de Joseph Lohschmidt ». Ouvrages de vulgarisation, p. 245, 1905.
  3. E. Rutherford et H. Geiger, Proc. Roy. Soc. A, vol. 81, p. 62 (1908).