Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, IX et X.djvu/558

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C’est par une conduite pareille que ceux qui gouvernent réduisent les gouvernés à cette triste situation : ils se corrompent eux et leurs enfans ; ceux-ci gâtés par le luxe et l’inexpérience des fatigues du corps et de l’ame, deviennent indolens et trop faibles pour résister, soit au plaisir, soit à la douleur.

Cela est vrai.

Eux-mêmes, uniquement occupés à s’enrichir, ils négligent tout le reste, et ne se mettent pas plus en peine de la vertu que les pauvres.

Sans contredit.

Or, en de telles dispositions, lorsque les gouvernans et les gouvernés se trouvent ensemble en voyage, ou dans quelque autre rencontre, dans une théorie[1], à l’armée, sur mer ou sur terre, et qu’ils s’observent mutuellement dans les occasions périlleuses, les riches n’ont certes nul sujet de mépriser les pauvres ; au contraire, souvent un pauvre maigre et hâlé, posté dans la mêlée à côté d’un riche élevé à l’ombre et surchargé d’embonpoint, en le voyant tout hors d’haleine et embarrassé de sa personne, ne penses-tu pas qu’il se dit à lui-même que ces gens-là ne doivent leurs richesses qu’à la lâcheté des

  1. Voyez le Phédon, t.1, p.185.