Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, IX et X.djvu/93

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donc pas de nous montrer qu’elle est meilleure que l’injustice : fais-nous voir comment, par leur vertu propre, dans l’ame où elles habitent, que les dieux et les hommes en aient connaissance ou non, l’une est un bien et l’autre est un mal.

J’avais toujours admiré l’heureux naturel de Glaucon et d’Adimante, mais en cette circonstance [368a] je fus ravi de leurs discours, et je leur dis : Enfans d’un tel père, c’est avec raison que l’amant de Glaucon commence ainsi l’élégie qu’il composa pour vous, quand vous vous fûtes distingués à la journée de Mégare[1] :


Ô fils d’Ariston, couple divin issu d’un glorieux père.


Cet éloge vous convient parfaitement, ô mes amis ; oui, il faut qu’il y ait en vous quelque chose de divin, si, après avoir pu faire une telle apologie de l’injustice, vous n’êtes pas persuadés qu’elle vaut mieux que la justice. Or, réellement [368b] vous n’en êtes pas persuadés : vos mœurs et votre conduite me le prouveraient quand vos discours m’en feraient douter. Mais plus j’ai cette conviction, plus mon embarras est grand. D’un côté je ne sais, en vérité, comment défendre

  1. Bataille livrée près de Mégare par les Athéniens contre les Corinthiens, Olymp. 80, 4. Thucydide, I, 105 ; Diodore, XI, 79.