Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/106

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conque voudra empêcher qu’il ne se commette rien d’injuste ou d’illégal dans un état, ne le fera [32a] jamais impunément. Il faut de toute nécessité que celui qui veut combattre pour la justice, s’il veut vivre quelque temps, demeure simple particulier, et ne prenne aucune part au gouvernement. Je puis vous en donner des preuves incontestables, et ce ne seront pas des raisonnements, mais ce qui a bien plus d’autorité auprès de vous, des faits. Écoutez donc ce qui m’est arrivé, afin que vous sachiez bien que je sois incapable de céder à qui que ce soit contre le devoir, par crainte de la mort ; et que, ne voulant pas le faire, il est impossible que je ne périsse pas. Je vais vous dire des choses qui vous déplairont, et où vous trouverez peut-être la jactance des plaidoyers ordinaires : cependant je ne vous dirai rien qui ne soit vrai.

[32b] Vous savez, Athéniens, que je n’ai jamais exercé aucune magistrature, et que j’ai été seulement sénateur[1]. La tribu Antiochide, à laquelle j’ap-

  1. Le peuple athénien était divisé en dix tribus dont chacune fournissait cinquante représentants au conseil des cinq cents, ou sénat, qui se trouvait ainsi composé de dix classes. Chacune d’elle gouvernait à son tour pendant trente-cinq jours. Ces cinquante sénateurs s’appelaient prytanes, et la durée de leurs fonctions, une prytanie ; enfin, ils étaient nourris aux frais de l’état, dans un édifice public nommé Prytanée (Barthélemy, Voyage d’Anach., ch. 14).