Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, I et II.djvu/516

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lui tourne ; il est étonné, interdit ; il ne sait ce qu’il dit, et il apprête à rire, non point aux servantes de Thrace ni aux ignorans, car ils ne s’aperçoivent de rien, mais à tous ceux qui n’ont pas été élevés comme des esclaves. Tel est, Théodore, le caractère de l’un et de l’autre sage. Le premier, celui que tu appelles philosophe, élevé dans le sein de la liberté et du loisir, ne tient point à déshonneur de passer pour un homme simple et qui n’est bon à rien, quand il s’agit de remplir certains ministères serviles, par exemple, d’arranger un bagage, d’assaisonner des mets ou des phrases. L’autre, au contraire, entend parfaitement l’art de s’acquitter de tous ces emplois avec dextérité et promptitude ; mais ne sachant point porter son manteau avec grâce et en homme libre, il est incapable de s’élever jusqu’à l’harmonie du discours, et de chanter dignement la véritable vie des dieux, et des hommes qui participent de leur félicité.

THÉODORE.

Si tu pouvais persuader à tous les autres, comme à moi, la vérité de ce que tu dis, Socrate, il y aurait plus de paix et moins de maux parmi les hommes.

SOCRATE.

Mais il n’est pas possible, Théodore, que le mal soit détruit, parce qu’il faut toujours qu’il