Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, VII et VIII.djvu/512

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dans la société tout mélange de biens et de caractères : de là, dans la plupart des États, [773c] l’inconvénient dont nous voulons préserver le nôtre. Mais de défendre par la lettre de la loi au riche d’épouser la fille du riche, et à l’homme puissant de s’allier à une autre famille puissante, et de forcer ceux d’un caractère vif de s’unir par le mariage aux personnes d’un caractère lent, et réciproquement ; outre que cela paraîtrait ridicule, il serait à craindre que beaucoup de gens n’en fussent très-choqués. En effet, il n’est point aisé à tous de concevoir que les humeurs [773d] doivent être mêlées dans un État, comme les liqueurs dans une coupe, où le vin versé seul pétille et bouillonne, tandis que, corrigé par le mélange d’une autre divinité sobre, il devient, par cette heureuse alliance, un breuvage sain et modéré. Tel est l’effet que produit le mélange dans les mariages, mais presque personne n’est capable de s’en apercevoir. C’est ce qui nous met dans la nécessité de ne point faire de loi expresse sur ce point, et d’essayer seulement auprès de nos citoyens la voie douce de la persuasion, leur insinuant de songer plutôt en mariant leurs enfants [773a] à assortir les personnes, qu’à vouloir par une avarice insatiable que les biens de fortune soient égaux de part et d’autre, et détournant par la