Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/497

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cer est de Stésichore, fils d’Euphémos, né à Himère[1]. Il faut s’écrier en commençant : Non, ce discours n’est point vrai ; non, l’ami froid ne doit pas obtenir la préférence sur l’amant, par cela seul que l’un est dans son bon sens et l’autre en délire. Rien de mieux s’il était démontré que le délire fût un mal : au contraire, les plus grands biens nous arrivent par un délire inspiré des dieux. C’est dans le délire que la prophétesse de Delphes et les prêtresses [244b] de Dodone ont rendu aux citoyens et aux États de la Grèce mille importants services ; de sang-froid elles ont fait fort peu de bien, ou même elles n’en ont point fait du tout. Parler ici de la sibylle et de tous les prophètes qui, remplis d’une inspiration céleste, ont dans beaucoup de rencontres éclairé les hommes sur l’avenir, ce serait passer beaucoup de temps

  1. Il florissait environ 570 ans avant Chr. Il fit des poésies lyrico-épiques. On voit à quel haut rang le met Platon. Quintilien dit qu’il soutint par la lyre le fardeau de l’épopée. Suidas assure qu’il inventa la lyre, le principal ornement du chœur, ce qui le fit passer pour l’inventeur du chœur, et fit changer son premier nom Tisias en celui de Stésichore (ἔστησε χορόν). Il est l’auteur des premiers poèmes nommés Παιδικά, et voilà sans doute pourquoi Platon met ici dans sa bouche un discours inspiré par l’Amour. M. Blomfield a recueilli les fragments qui en restent dans le Mus. crit. Cant., n° 6.