Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/579

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SOCRATE.

C’est le discours que la science écrit dans l’âme de celui qui étudie. Celui-là du moins peut se défendre, parler et se taire quand il le faut.

PHÈDRE.

Tu parles du discours vivant et animé qui réside dans l’intelligence, et dont le discours écrit n’est que le simulacre.

[276b] SOCRATE.

C’est tout-à-fait cela. Réponds-moi donc : un laboureur sensé, s’il avait des semences qu’il affectionnât et qu’il voulût voir fructifier, irait-il sérieusement les planter en été dans les jardins d’Adonis[1] pour les voir, à sa grande satisfaction, devenir de belles plantes en moins de huit jours, ou bien, si jamais il le faisait, ne serait-ce pas par forme d’amusement ou à l’occasion d’une fête ? Mais celles dont il s’occuperait sérieusement, sans doute suivant les règles de l’agriculture, il les sèmerait dans un terrain convenable, et se contenterait de les voir arri-

  1. C’étaient des espèces de pots ou de corbeilles dans lesquelles on semait des plantes rares pour les faire venir vite et orner de leur verdure le temple d’Adonis, dans les fêtes consacrées à ce demi-dieu. Théocrite en parle dans sa quinzième idylle.