Page:Platon - Œuvres, trad. Cousin, V et VI.djvu/685

La bibliothèque libre.
Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

avons examiné et traité la chose comme nous devions, il s’ensuit que la vertu n’est point naturelle à l’homme, ni ne peut s’apprendre ; mais qu’elle arrive par une influence divine à ceux en qui elle se rencontre, sans intelligence de leur part ; [100a] à moins qu’on ne nous montre quelque politique en état de communiquer son habileté à un autre. S’il s’en trouve un, nous dirons de lui qu’il est entre les vivants ce qu’est Tirésias entre les morts, au rapport d’Homère, lequel dit de ce devin qu’il est le seul sage aux enfers, et que les autres ne sont que des ombres errantes à l’aventure[1]. De même cet homme serait à l’égard des autres pour la vertu ce que la réalité est à l’ombre.

[100b] MENON.

Cela me paraît parfaitement bien dit, Socrate.

SOCRATE.

Il paraît donc, d’après ce raisonnement, Menon, que la vertu vient par un don de Dieu à ceux qui la possèdent. Mais nous ne saurons le vrai à ce sujet que lorsqu’avant d’examiner comment la vertu se trouve dans les hommes, nous entreprendrons de chercher ce qu’elle est en elle-même. Maintenant il est temps que je me

  1. Odyss. X, 496.