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LE BANQUET.

poses [219a] du cuivre contre de l’or[1]. Mais, bon jeune homme, regardes-y de plus près : peut-être te fais-tu illusion sur le peu que je vaux. Les yeux de l’esprit ne commencent guère à devenir plus clairvoyants qu’à l’époque où ceux du corps s’affaiblissent, et cette époque est encore bien éloignée pour toi. — Là-dessus je repris : De mon côté, Socrate, c’est une affaire arrangée : je ne t’ai rien dit que je ne pense ; c’est à toi de voir ce que tu jugeras le plus à propos et pour toi et pour moi. — Très-bien parlé ! répondit-il. Ainsi nous verrons, et nous ferons ce qui nous paraîtra [219b] le plus à propos pour nous deux sur ce point comme sur tout le reste.

Cela dit de part et d’autre, je crus que le trait que je lui avais lancé avait atteint son but ; je me lève donc, et sans lui laisser rien dire de plus, enveloppé dans ce manteau que vous me voyez, car c’était en hiver, je m’étends sous la vieille capote de cet homme-là, et jetant mes deux bras [219c] autour de ce divin et merveilleux personnage, je passai près de lui la nuit entière. Sur tout cela, Socrate, tu n’as qu’à dire si je ments ! Eh bien !

  1. Locution proverbiale qui fait allusion à l’échange des armes entre Diomède et Glaucus dans l’Iliade, liv. VI, v. 236.