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ALCIBIADE

aussi beau que possible, en façonnant ses membres enfantins et en les redressant ; et pour ces soins, on les honore grandement.

À e sept ans, ces enfants commencent à monter à cheval et prennent des leçons d’équitation ; ils commencent alors à chasser. Dès qu’ils atteignent deux fois sept ans, on les confie à ceux qu’on appelle les gardiens des enfants royaux ; ce sont des Perses d’âge mûr qui sont choisis comme les meilleurs, au nombre de quatre, le plus savant, le plus juste, le plus tempérant, le plus courageux. 122 Le premier enseigne la science des mages, due à Zoroastre, fils d’Horomasde, — c’est, en fait, le culte des dieux ; — il enseigne aussi l’art de régner ; le plus juste apprend à l’enfant à dire toute sa vie la vérité ; le plus tempérant à ne se laisser asservir par aucun plaisir, afin qu’il s’habitue à être libre et vraiment roi, sachant commander d’abord à ses instincts, au lieu de s’en rendre esclave ; le plus courageux le rend intrépide, exempt de crainte, en lui montrant que toute crainte est esclavage[1]. Pour toi au contraire, Alcibiade, Périclès t’a donné comme gardien, dans ton enfance, b un de ses esclaves que l’âge rendait tout à fait inutilisable, Zopyre le Thrace. Je pourrais t’exposer ainsi en détail tous les soins donnés à l’éducation de tes futurs adversaires, si ce n’était trop long et si d’ailleurs ceci ne suffisait pour te montrer tout ce qui s’ensuit. Au reste personne, à peu près, Alcibiade, ne se soucie de ta naissance ni de ton éducation, non plus que de celles d’aucun autre Athénien, à moins d’être amoureux de toi.

Maintenant, si tu aimais mieux considérer la richesse, le luxe, les vêtements, les c robes traînantes, l’usage des parfums, les cortèges de serviteurs et toutes les délicatesses de la vie des Perses, tu serais humilié de ta condition, tant elle est loin de la leur. Et de même, si tu voulais regarder la tempérance des Lacédémoniens, leur tenue, leur aménité et leur bonne humeur, leur grandeur d’âme, leur discipline, leur courage, leur endurance, leur passion des exercices, des

  1. Les détails donnés par Xénophon au chapitre ier du premier livre de la Cyropédie sur le même sujet ne sont pas tout à fait identiques à ce qui est dit ici ; mais les deux témoignages concordent en gros. D’ailleurs Xénophon ne distingue pas l’éducation des fils de rois de celle des autres enfants.