Page:Platon - Œuvres complètes, Les Belles Lettres, tome III, 2.djvu/9

La bibliothèque libre.
Cette page a été validée par deux contributeurs.

NOTICE



Le Gorgias a pour sous-titre : Sur la Rhétorique. Si l’on s’attendait, sur la foi de cette indication, à y trouver des vues sur l’art d’écrire, de parler ou de composer (comme dans le Phèdre, par exemple), on serait déçu : la Rhétorique est ici uniquement envisagée dans sa valeur politique et morale, et Platon la dénonce avec une rigueur impitoyable comme un art de mensonge, funeste aux États et aux individus ; le titre du dialogue pourrait être : Contre la Rhétorique.

Par certains côtés, le Gorgias fait pendant au Protagoras. Dans les deux dialogues, ce sont les deux prétentions essentielles de la sophistique contemporaine, celle de former l’homme instruit en général et celle de former spécialement l’orateur, qui sont prises à partie : les noms des deux grands sophistes correspondent chacun à l’une de ces deux tendances. Dans les deux dialogues, la doctrine de Platon est toute socratique : le Gorgias n’aborde pas plus que le Protagoras les théories proprement platoniciennes. Enfin la beauté littéraire est égale dans les deux ouvrages, quoique différente : le Gorgias n’a pas la variété de tons, les nombreux personnages, le pittoresque brillant, la grâce souple et vivante du Protagoras ; mais il abonde en raisonnements vigoureux et surtout en pages éloquentes où la logique passionnée s’unit à la poésie et au mysticisme pour créer une sorte d’émotion caractéristique du génie de Platon.