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PHÈDRE

dialogues, des inimitiés que Socrate a suscitées contre lui, encore moins de poursuites judiciaires, possibles, imminentes, ou déjà engagées. C’est donc, si l’on tient à toute force à situer dans l’histoire sociale et politique une scène qui est, en elle-même, en dehors de toute histoire, que Platon a voulu nous reporter à une époque éloignée du procès. La scène n’a besoin d’être située que dans la série de ces petits drames fictifs dont Socrate est l’ordinaire protagoniste : c’est un cas analogue à celui de la Comédie humaine de Balzac.


Topographie.

Ce qui, par une singularité remarquable, mérite en revanche plus d’attention, c’est le lieu même de cette scène. Il ne semble pas en effet qu’il soit imaginaire, puisque les indications topographiques données par Platon nous permettent, avec le secours des découvertes archéologiques, de le retrouver sur le terrain[1]. Relevons dans leur ordre toutes ces indications. Phèdre va pour faire une promenade hors des Murs et sur la grand’route (227 a) : c’est donc qu’au moment de sa rencontre avec Socrate il est encore en dedans, et l’expression, malgré ce qu’un peu plus bas (228 b) elle a d’ambigu, n’y peut avoir un autre sens. De l’endroit où ils se sont rencontrés on voit, Phèdre la montre, la maison de Morychus et, tout contre, on aperçoit aussi le temple de Zeus Olympien. Phèdre invite Socrate à marcher avec lui, tout en devisant (b, l. 8). Si longue que puisse être la promenade projetée par Phèdre, Socrate est prêt à le suivre en partant des Murs jusqu’à Mégare, et même à faire deux fois ce chemin aller et retour, selon le précepte d’Hérodicus (227 d). Toutefois, puisqu’aussi bien il faudra s’asseoir quelque part pour lire le discours, il propose à un moment de se détourner de la grand’route pour suivre le cours de l’Ilissus (229 a) jusqu’où il fera bon de s’arrêter. Chemin faisant, on discute de l’endroit où Borée

  1. Voir Thompson, The Phaedrus (1868), notes à 229 c et 230 b (p. 7 et 9) ; Wilamowitz, Platon² I, p. 456, n. 1. Je dois tout ce qui suit, ainsi que le plan de la page suivante, à la compétence de mon collègue Ch. Picard, ancien directeur de l’École française d’Athènes, à qui j’exprime ma plus vive gratitude pour l’empressement bienveillant avec lequel, à ma demande, il a étudié les données de ce petit problème.