la musique par Lampros, et à l’éloquence par Antiphon de Rhamnonte[1], serait pourtant capable, lui aussi, en louant des Athéniens à Athènes, d’acquérir du renom.
Ménexène. — Et qu’aurais-tu à dire, s’il te fallait parler ?
Socrate. — De mon propre fonds, je ne tirerais probablement rien. Mais, pas plus tard qu’hier, j’écoutais Aspasie b faire toute une oraison funèbre sur le même sujet. Elle avait appris, comme tu le dis toi-même, que les Athéniens allaient choisir l’orateur. Là-dessus, elle développa sur-le-champ devant moi une partie de ce qu’il fallait dire ; quant au reste, elle y avait déjà réfléchi, au moment, je suppose, où elle composait l’oraison funèbre prononcée par Périclès, et c’était des rognures de ce discours qu’elle soudait ensemble.
Ménexène. — Te rappellerais-tu ce que disait Aspasie ?
Socrate. — Autrement, je serais bien coupable ; j’apprenais de sa bouche, et j’ai failli recevoir c des coups parce que j’oubliais.
Ménexène. — Qu’attends-tu donc pour l’exposer ?
Socrate. — Prends garde que mon maître ne se fâche contre moi, si je divulgue son discours !
Ménexène. — Ne crains rien, Socrate, et parle. Tu me feras le plus grand plaisir, que ce soit d’Aspasie ou de tout autre que tu veuilles rapporter les propos. Parle seulement.
Socrate. — Mais peut-être vas-tu rire de moi, si je te parais, vieux comme je suis, m’adonner encore au badinage.
Ménexène. — Point du tout, Socrate. Parle, de toute façon.
Socrate. — Eh bien, assurément il me faut te complaire ; au point que si tu m’invitais à d quitter mon manteau pour danser[2], je serais presque disposé à te faire ce plaisir, puisqu’aussi bien nous sommes seuls. Écoute donc. Commençant son discours par les morts eux-mêmes, elle s’exprimait, si je ne me trompe, de la manière suivante :
- ↑ Sur Connos, voir la Notice, p. 78-79. — Lampros, musicien célèbre, fut le maître de Sophocle. — Antiphon (480 environ-411), maître de rhétorique et logographe, est représenté par Thucydide (VIII, 68) comme le premier orateur de son temps.
- ↑ La danse était une partie de la gymnastique. Socrate, suivant Xénophon, Banquet, II, 19, s’y exerçait chez lui pour entretenir la