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précisément, si l'on voulait élever contre notre cité un grief légitime 4 , on ne pourrait avec raison lui faire qu'un reproche, celui d'être en toute circonstance trop pitoyable et de se mettre au service du faible. C'est ainsi qu'en ce temps-là, elle ne put tenir bon ni garder jusqu'au bout sa résolution
245 a de ne secourir contre l'asservissement aucun de ceux qui lui
avaient fait tort; elle se laissa fléchir et leur vint en aide. En personne, elle secourut les Grecs, et les arracha à la servi- tude, leur assurant une liberté qu'ils conservèrent jusqu'au jour où ils recommencèrent à s'asservir eux-mêmes. Quant au Grand Roi, elle n'osa le défendre elle-même, par respect pour les trophées de Marathon, de Salamine et de Platées ; mais, en permettant seulement aux bannis et aux volontaires d'aller à son secours, elle le sauva, de l'aveu unanime 2 . Après s'être construit des murs et une flotte, elle accepta la
b guerre, quand elle y fut contrainte, et combattit les Lacédé- moniens pour la défense de Paros 3 .
« Mais le Grand Roi eut peur de notre cité, quand il vit les Lacédémoniens renoncer à la guerre maritime. Désireux de faire défection, il réclamait les Grecs du continent '* que lui avait précédemment livrés Lacédémone 5 , comme condition de son alliance avec nous et les autres alliés, s'attendant à un
c refus qui servirait de prétexte à sa défection. Les autres alliés le déçurent : Corinthiens, Argiens, Béotiens et le reste des alliés consentirent à cet abandon ; ils convinrent et jurèrent» s'il était prêt à leur donner de l'argent, de livrer les Grecs du continent ; seuls, nous n'osâmes ni les livrer ni prêter ser- ment. Voilà comme la générosité et l'indépendance de notre ville
1 . L'orateur paraît sentir la faiblesse de sa thèse ; il essaie de justifier pour Athènes ce rapprochement avec la Perse dont il faisait plus haut un grief à Sparte.
2. Sur l'exactitude historique de tout cet exposé, voir la Notice, p. 62.
3.* La leçon des mss., IIap:a>v, a paru suspecte à nombre de cri- tiques, et les corrections les plus diverses ont été proposées. Il semble pourtant que le texte puisse être conservé. L'orateur paraît faire allu- sion aux efforts de Conon (en 304/30,3) pour chasser des Cyclades les harmostes lacédémoniens (Xénophon, Helléniques, IV, 8). C'est vers cette époque que Pasinos s'empara de Paros (Isocrate, Éginét., 18).
4. D'Asie Mineure.
5. Par l'accord de £12 (Thucydide, VIII, 18).
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