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EUTHYDÈME

que son frère (283 a). C’est pourtant lui qui a le principal rôle. Socrate lui-même le fait ressortir quand il le compare à l’hydre, et Dionysodore au crabe de la légende (297 c). C’est Euthydème qui se charge d’annoncer que son frère et lui ont délaissé les arts dont ils faisaient autrefois profession, pour enseigner la vertu mieux que personne. C’est lui qui ouvre le premier entretien avec Clinias. Quand Socrate, à la fin de son second dialogue avec le jeune homme, appelle les sophistes à l’aide, c’est Euthydème qui prend la parole « sur un ton plein de superbe ». Plus fin ou moins imprudent que son frère, il conserve dans le débat une tenue dédaigneuse et garde son sang-froid. Il lui arrive sans doute, reprenant un reproche de Dionysodore (287 b), de traiter Socrate de radoteur et de s’impatienter de ses distinctions (295 b et suiv.). Mais il ne se laisse pas emporter par la discussion, et il blâme son frère de gâter le raisonnement par une maladresse dont il fait voir aussitôt la conséquence (297 a).

Dionysodore est comme la caricature d’Euthydème. Il est toujours prêt à renchérir sur les subtilités de son frère, et à charger l’interlocuteur. Dans le premier entretien avec Clinias, il s’empresse de donner la réplique à Euthydème, en s’emparant aussitôt de la thèse opposée pour mieux abasourdir le jeune homme. Pris à partie par Ctésippe, il se plaint d’être injurié ; il se fâche à son tour. La passion et le désir de confondre à tout prix l’adversaire l’entraînent à des écarts de raisonnement qui lui attirent, avec une dure observation de son frère, l’humiliation de se voir battu par Ctésippe, pourtant un novice. Quelques-uns des sophismes les plus absurdes, notamment celui qui termine l’entretien, ont été mis dans sa bouche par l’auteur du dialogue. Dionysodore fait l’effet d’une sorte de mécanique, qui exécute avec un automatisme devenu presque instinctif certains mouvements, sans l’intelligence qui serait nécessaire pour en arrêter ou en modifier le jeu suivant les circonstances.


Socrate.

Au-dessus de ses jeunes amis, et au-dessus des deux sophistes, Socrate domine tout le dialogue. On retrouve en lui dans l’Euthydème ses qualités habituelles de raison lucide, souple et ferme, de sérénité souriante et de malicieuse bonhomie. Il veille avec sollicitude sur Clinias, l’encourage à répondre quand il