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NOTICE

cette pause arrête l’attention sur les étonnants progrès que Clinias, paralysé d’abord par les sophistes, a réalisés grâce à la méthode de Socrate ; elle fait ressortir la difficulté de la recherche, et prépare avec une espèce de solennité la discussion finale. En montrant l’importance du problème à résoudre, elle accuse l’impuissance des sophistes, et nous achemine vers la conclusion.


Les deux éristiques.

Les deux sophistes mis en scène sont originaires de Chios, à ce que croit Socrate. Après avoir émigré à Thurium, ils ont été bannis de cette ville, et depuis de nombreuses années ils vivent en Grèce. Au moment de l’entretien, ils sont de passage à Athènes, mais ils y ont déjà fait un séjour (273 e) l’année d’avant ou la précédente (272 b ; cf. 287 c). Jusqu’alors ils se piquaient des connaissances les plus variées : experts à toutes les formes de la lutte, notamment à l’hoplomachie, ils se vantaient d’en enseigner le secret moyennant salaire. Leur habileté s’étendait à tout l’art de la guerre, à la tactique, à la stratégie ; bref, à tout ce que doit savoir un chef d’armée. En outre ils excellaient aux luttes judiciaires : ils savaient parler eux-mêmes devant un tribunal, et enseigner l’art de composer des discours appropriés à un auditoire de juges. Ce savoir si divers les apparentait à Hippias d’Élis. Car l’activité d’Hippias embrassait toutes les choses de l’esprit ; il parlait avec la même facilité sur l’astronomie, l’arithmétique, la géométrie, les syllabes, les rythmes, les modes et la mnémotechnie ; il discourait sur les généalogies des héros, la fondation des cités et l’antiquité en général ; il composait de magnifiques exhortations, des épopées, des tragédies et des dithyrambes[1]. Et, comme les sophistes de l’Euthydème, il pratiquait avec virtuosité les arts manuels : orfèvre, ciseleur, verrier, cordonnier, tisserand, il avait fabriqué lui-même son anneau, son cachet, son strigile, sa fiole à huile et ses vêtements[2]. Mais aujourd’hui Euthydème et Dionysodore tiennent pour accessoires leurs talents de naguère ; la science qu’ils professent est l’éristique (272 b) : ils excellent à réfuter, qu’il s’agisse de vérité ou d’erreur. L’objet de leur étude est

  1. Hippias majeur, 285 b sq. (cf. Hipp. min., 367 e sq.) ; 286 ab ; Hipp. min., 368 cd.
  2. Hippias min., 368 bc.