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LA RÉPUBLIQUE

Non, dit-il, et il ne te reste guère que la dorienne et la phrygienne.

Je ne me connais pas en harmonies, repris-je ; mais laisse-nous celle qui sait imiter comme il convient les tons et les accents d’un brave engagé dans une action guerrière ou dans quelque travail violent, et qui, trahi par le sort, court au-devant des blessures et de la mort ou tombe dans quelque autre disgrâce, bmais qui, en toutes ces occasions, repousse sans lâcher pied et sans perdre courage les assauts de la fortune. Laisse-nous-en une autre encore pour imiter un homme engagé dans une action pacifique, non violente, mais volontaire, qui, pour arriver à son but, cherche à gagner un dieu par la prière ou à persuader un homme par ses leçons et ses conseils, ou qui au contraire se montre sensible aux prières, aux leçons ou aux remontrances de son semblable, et qui, ayant par ces moyens réussi suivant ses désirs, n’en conçoit pas d’orgueil, mais se conduit en toutes ces circonstances cavec sagesse et modération et s’accommode des événements. Ce sont ces deux harmonies, la violente, la volontaire, qui sont les mieux faites pour imiter les accents du malheur, du bonheur, de la sagesse, de la bravoure, ce sont elles qu’il faut nous laisser.

Mais, répondit-il, ces harmonies que tu désires garder sont justement celles que je viens de nommer.

Dès lors, repris-je, nous n’aurons que faire pour nos chants et nos mélodies d’instruments à cordes nombreuses et qui rendent toutes les harmonies.

C’est pour moi chose évidente, dit-il.

Nous n’aurons donc pas à entretenir des fabricants de triangles, de pectis, det autres instruments à cordes et à notes nombreuses ?

Il y a apparence.

Et les fabricants de flûtes, et les flûtistes, les recevras-tu dans la cité ? La flûte n’est-elle pas l’instrument qui a le plus de sons, et les instruments mêmes qui rendent toutes les harmonies ne sont-ils pas des imitations de la flûte ?

    nie s’applique aux modes musicaux. Les modes différaient les uns des autres, non seulement par l’arrangement des intervalles, comme nos modes majeur et mineur, mais encore par la hauteur des sons.